Les loups sauvent des vies… même en France !
Feuilleton proposé par le Groupe Loup - Bretagne : Episode 3/12
En France, le panneau « passage d’animaux sauvages » représentant un cerf bondissant appelle les automobilistes à la vigilance. Chevreuils, sangliers et cerfs occasionnent 35 000 collisions recensées par an. (Photo anonyme Zoomalia)
Les prédations effectuées en France par les loups sur les populations de chevreuils et de sangliers ont déjà évité des accidents corporels et matériel qui auraient sans cela coûté des millions d’euros. Parmi bien d’autres statistiques sur la situation française, on notera que la notion de « valeur statistique de la vie humaine » n’est pas estimée de la même façon en France et aux États-Unis. Ce qui n’empêche pas les loups de sauver des vies humaines, en France comme ailleurs.

Le gain apporté par la présence des loups en matière de sécurité routière en France a récemment fait lui aussi l’objet d’une étude chiffrée (Sèbe, M., et al., 2023.). L’étude n’a pris en compte que la baisse d’effectif des chevreuils et des sangliers (les deux espèces les plus impliquées dans des accidents de la circulation en France) due à la prédation lors de la présence de loups sur le territoire français sachant que cerfs, sangliers et chevreuils sont à l’origine d’environ 35 000 accidents de circulation chaque année. Selon l’étude, sur l’année de référence 2018, la seule prédation effectuée par les loups a permis d’économiser pour la France entre 2,4 et 7,8 millions d’euros de coûts dus aux accidents corporels et matériels qui ne sont pas survenus. On notera que ces travaux ne prennent pas en compte l’effet « paysage de la peur » dont l’étude américaine soulignait l’importance. On peut s’attendre en réalité à une évaluation des gains sensiblement plus importante si l’on intègre ce paramètre. Il est d’ailleurs possible de constater indirectement la réalité de ce phénomène en France comme dans d’autres pays d’Europe (Allemagne, Pays-Bas, Belgique…) en raison du nombre de loups tués par collision automobile. Un facteur de mortalité non négligeable pour cette espèce qui n’hésite pas à cheminer à proximité des axes de circulation qui facilitent ses déplacements.
Un certain nombre de données chiffrées ont été retenues pour cette étude :
23 000 collisions impliquant chevreuils et sangliers ont été recensés en 2005.
Les collisions avec les chevreuils entraînent des blessures humaines dans 1 % des cas et une mortalité humaine dans 0,05 %. Dans le cas de collision avec des sangliers, ces chiffres sont respectivement de 4 % pour les blessures et de 0,2 % pour les décès.
Les dommages aux véhicules coûtent en moyenne de 1 525 euros en cas de collision avec un chevreuil et de 1 932 euros si c’est avec un sanglier.


Sur un territoire donné, la simple diminution des effectifs de chevreuils et de sangliers due à la prédation par les loups fait baisser mécaniquement le nombre de collisions de 6 %.
Pour l’année 2018 servant de référence, les auteurs estiment que 1338 collisions, 16 blessures humaines et 0,8 décès ont été évités, grâce à la présence en France de 530 loups.
Le coût pour la société d’un blessé grave (15 % des blessés) est en moyenne de 272 033 euros. En cas de décès, le coût pour la société, retenu dans cette étude pour estimer le prix d’une vie humaine perdue, est de 1 937 205 euros. On notera que la « valeur statistique de la vie » permet de quantifier la valeur du capital humain. Cette notion est utilisée dans les calculs de bénéfice/risque, notamment pour aider aux prises de décisions de politiques publiques en matière de prévention (Mathis, J., 2021). Cette valeur varie en fonction des pays et des niveaux de vie. Actuellement, elle est plutôt estimée pour une personne à 3,1 millions d’euros en France, et à 7,5 millions de dollars aux États-Unis.
Prochaine épisode (4) : Quand les loups sauvent des moutons !
Références bibliographiques :
Mathis, J., (2021). Combien vaut une vie ? Le Tremplin des idées. Paris. 297 p. Résumé : « Combien vaut une vie statistique ? »
Synthèse de l’article en français.
Cet article peut être librement reproduit, partiellement ou en totalité et pour des usages non commerciaux, à la condition de n’être ni modifié ni adapté et d’être cité sous la référence de la publication d’origine : Jean, A.,GLB., (2024). Les effets bénéfiques de la présence des loups. Groupe Loup Bretagne, publié 3e trimestre 2024, 27 p. https://loup.bzh/ © 2024 Les auteurs, Alain JEAN, Groupe Loup Bretagne.
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